Delphine Mercier, sociologue CNRS au LEST, cosigne avec Pierre Tripier, PRINTEMPS, le chapitre 3 "Nomadism: a forgotten paradigm" dans l'ouvrage dirigé par Aline Averbouh, Nejma Goutas et Sophie Méry, archéologues CNRS, et publié aux Publications Scientifiques du Muséum.
Auteur
Édition Publications Scientifiques du Museum
Chapitre de Delphine Mercier, LEST - AMU, et Pierre Tripier, Printemps
in Nomad lives: from Prehistoric Times to the Present Day dirigé par Aline Averbouh, Nejma Goutas et Sophie Méry.
Cet article a pour ambition de revenir sur la manière dont la sociologie rend compte de l’éternel conflit entre nomades et sédentaires. Il part du constat que la philosophie politique occidentale, et, avec elle, les visions de la démocra- tie, du contrat social et de la société, sont des visions de sédentaires. Pourtant, ceux-ci n’ont pas cessé de cohabiter, de façon souvent conflictuelle, avec des nomades auxquels « la mondialisation » donne à nouveau la possibilité d’être des acteurs historiques importants ; pourtant, ils restent cachés pour la théo- rie, puisqu’invisibles aux yeux des tenants du paradigme dominant, comme le montrent les ouvrages d’Alessandro Monsutti sur l’Homo-Itinérans de la planète afghane, de Michel Peraldi sur les « Commerçants à la valise », aventuriers du nouveau capitalisme, et d’Alain Tarrius sur les « Transmigrants », ...
Les travaux sur la migration prolifèrent mais certains d’entre eux n’abordent jamais des enjeux pourtant cruciaux à appréhender si l’on veut comprendre le nomadisme dans sa forme moderne, ne pas se contenter de décrire le déplace- ment mais élucider ses raisons : condition sociale, commerce, guerre, travail, mobilité, mobilisation... Notre hypothèse est qu’il en va de même à propos du nomade, rejeté par les populations sédentaires. Comme l’habitant du tiers monde, l’immigré ou la femme, il est considéré non seulement comme illégi- time mais, à l’égal des peuples colonisés, il est pensé au mieux comme une bi- zarrerie, au pire comme une manifestation de la barbarie. Or, rien ne ressemble plus à un acteur du monde globalisé qu’un nomade.
Dans un premier temps, nous reviendrons sur les origines du paradigme « nomade », en nous focalisant notamment sur les termes clefs qui le carac- térisent comme la famille, le clan, la tribu, mais surtout en démontrant l’in- compréhension et l’invisibilité dont il pâtit. Dans un deuxième temps, nous analyserons les difficultés que pose aux nomades l’ordre « rationnel-légal » de la bureaucratie capitaliste. Enfin, nous tenterons de réfléchir à une nouvelle épistémologie de la recherche adaptée à ce nomadisme moderne.
Précisons-le : nous questionnons le paradigme « nomadisme » dans la tempo- ralité restreinte de la sociologie et de l’histoire, et non à l’échelle temporelle de l’archéologie. En outre, nous nous sommes focalisés sur la figure du nomade « rejeté », ce qui nous a permis de la relier à celle du transmigrant étudié par Alain Tarrius mais qui entraîne un biais en réduisant la complexité du phéno- mène envisagé. La vocation de notre texte est donc de revenir sur l’émergence de ce paradigme nomade.
- Chapitre d'ouvrage
Delphine Mercier, Pierre Tripier. Nomadism: A forgotten paradigm.. Aline Averbough; Nejma Goutas; Sophie Mery. Nomad Lives. From Prehistoric times to the present day., Publications Scientifiques du Museum, 2021, 978-2-85653-966-8
1 novembre 2021 - [halshs-02990121]