La formation professionnelle : parent pauvre de la sociologie de l’éducation ?

Article Lundi 04 octobre 2021

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Dans Éducation et Sociétés
Édition De Boeck Supérieur

Éducation et Sociétés N° 56

 

La formation professionnelle et technique : d’objet secondaire de la sociologie de l’éducation au rang d’objet phare des sciences sociales comparatives

Introduction au dossier d'Eric Verdier et Pierre Doray

Les objets de la sociologie de l’éducation se sont diversifiés, mais sont inégalement traités par la littérature. La formation professionnelle et technique (FTP) est ainsi un thème secondaire, soumis à la domination de l’éducation générale. Cela vient de son faible statut social, lié à l’image d’une voie de relégation, et à sa complexité (disparité des modalités de formation, des acteurs, hétérogénéité des établissements et des statuts des apprenants, multiplicité des parcours, etc.). Les articles du dossier montrent que s’il peut être fondé de parler de secondarisation de la FPT, il importe surtout de renouveler les approches de ce phénomène. Il en ressort que la FTP initiale n’a pas d’homogénéité structurelle. La formation technique relève souvent de logiques propres, contribuant à son autonomie par rapport à la formation professionnelle dont, en outre, la diversité ne cesse de s’accroître. Appréhender la signification de cette hétérogénéité interne dans le temps et dans l’espace appelle autant à développer des comparaisons internationales, pour prendre en compte le changement et les hybridations de logique et de régulations, qu’à élaborer des problématiques interdisciplinaires. Il s’agit de replacer les dynamiques plurielles de la FTP dans celles du système éducatif et dans les relations entretenues en particulier avec le travail et l’emploi. Une approche croisant comparaisons et cas nationaux avec les dynamiques conceptuelles et transversales (genre, inégalités, discriminations, etc.) ouvre des perspectives stimulantes. Le cas suisse, véritable laboratoire de la diversité, constitue une expérience socio-historique probante. Pour toutes ces raisons s’affirme un mouvement de revalorisation tendant à faire de la FPT un objet nettement plus légitime pour les sciences sociales, bien au-delà de la seule sociologie.

DOI : 10.3917/es.046.0005

 

Les paradoxes de la démocratisation éducative entre sélection et déclassement. Le cas de l’enseignement technique secondaire en Argentine

Article d'Eric Verdier et Claudia Jacinto

L’enseignement technique secondaire (ETS) est depuis longtemps une filière importante du système éducatif argentin : elle accueille aujourd’hui 18 % des effectifs du secondaire qui se forment ainsi à différents profils professionnels. L’article l’analyse selon deux questions majeures : est-elle une voie de démocratisation éducative ? Favorise-t-elle l’insertion professionnelle des jeunes qui la fréquentent ? La position de cette filière dans l’espace éducatif est paradoxale : elle contribue à l’égalité des chances tout en étant sélective du point de vue éducatif et est caractérisée par l’ambivalence du devenir de ses diplômés sur le marché de travail. Centrée sur la politique menée par le gouvernement péroniste entre 2004 et 2015, l’analyse s’intéresse aux modalités d’accès à cette filière, aux acquis des formés à l’issue de la formation, aux taux de diplomation, à la poursuite d’études vers l’enseignement supérieur et à l’insertion professionnelle. Il s’avère que ces processus ne sont pas homogènes : ils révèlent des segmentations selon les territoires, les types d’établissements et l’origine des élèves.

DOI : 10.3917/es.046.0039

 

La justice sociale en éducation prioritaire : conceptions et opérationnalisations dans le cadre d’un dispositif de promotion de l’excellence

Article d'Alice Pavie, Noémie Olympio, Caroline Hache

En France, si la conception de l’excellence repose sur la performance académique, le phénomène de démocratisation ségrégative remet en question le principe méritocratique. L’article analyse, à travers le prisme des conceptions de la justice sociale, la manière dont les acteurs de l’éducation prioritaire se saisissent de “Parcours d’excellence”. Quelles pratiques de sélection choisissent-ils dans ce dispositif de promotion de l’égalité des chances ? Une recherche par entretiens (définition de l’excellence, objectifs déclarés, opérationnalisation de la sélection), menée de 2017 à 2019 en collaboration avec une académie ayant un fort taux d’établissements en éducation prioritaire, montre que la performance et la forme scolaire, critères objectivés du mérite, semblent orienter significativement le choix des publics destinataires de ce dispositif d’ouverture sociale. Si certains professionnels tentent de résister à l’injonction de sélection, ce refus de choisir peut s’inscrire dans une visée universaliste ou se traduire par la délégation du choix aux élèves eux-mêmes, sommés de se porter volontaires et ainsi exposés au risque d’auto-sélection.

DOI : 10.3917/es.046.0111

 

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